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BENITORAMA

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8 février 2008

Cabarrus plonifiée

De ces livres peu connus et un peu improbables, que l'on trouve d'occasion dans les murs de l'excellente librairie MCL d'Angoulême, je ramène ce jour-ci, à petit prix, un Madame Tallien, royaliste et révolutionnaire, de la Princesse de Chimay. Un livre Plon de 1936. Bien des choses derrière tout cela, donc. Comme un relent de pré-Thermidor ?

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6 février 2008

Une demoiselle de la République

Lorsque j'étais ce petit garçon franco-espagnol très catholique, très croyant, je partageais avec elle seule un monde secret, merveilleux, dont les mystères du Moyen-Age véhiculés par la Contre-Réforme ne s'étaient pas tout à fait retirés, un espace fait de formules graves, de livres aux pages fines, de liturgie et d'encens, de goût d'hostie fondant dans la bouche, d'églises pleines de générations et de prêtres d'allure vénérable. Dans ma famille, républicaine, laïque, athée, opposée à une Eglise souillée par son soutien au franquisme, j'étais en quelque sorte le fils qu'elle n'avait pu avoir. Nous étions beaux et d'un autre âge, partant à la messe, un petit garçon rond frisé, bermuda et genoux brutaux, une grande dame sérieuse et belle en mantille, empruntée au XVIIIe siècle. J'étais croyant, je quêtais l'absolu à ma faible mesure, un personnage bergmanien mais perdu dans une Castille appauvrie et encore ivre d'orgueil. Je cherchais Dieu passionnément, dans le silence et la solitude, je détestais ma chair, je la punissais, je m'inventais des pénitences et des cilices artisanaux, j'espérais Le trouver en punissant la détestable enveloppe corporelle qui me retenait d'élans sublimes. Et puis avec l'adolescence, Il me déserta. Un vide énorme en moi, que remplaça, jeune Don Quichotte gavé de lectures que j'étais, un désir puissant de révolution. Mais fait-on la révolution dans un trou perdu de province, dans les années 80 ? Dans les années 30, en Espagne, le souffle était là et elle était belle, jeune demoiselle de la République, laïque, joyeuse, rebelle. Elle fumait avec grâce dans un porte-cigarettes, ou jurait comme un charretier lorsqu'elle était ivre, elle soutenait cette belle, si belle République, porteuse de fleurs, émancipatrice de toutes les vieilles pierres noircies, libératrice des chaînes ferdinantes, elle riait au ciel, soulevait son chapeau, et tout lui paraissait possible. Elle se fit couturière, femme libre et indépendante, éduquant des générations de jeunes filles pauvres, elle voulut suivre un bel officier italien, elle se maria, divorça, elle n'en fit qu'à sa tête. Lorsque je la connus, je n'imaginais pas cette jeunesse folle, je voyais la vieille dame catholique, sérieuse, moralisatrice, tendrement casse-pieds, douce et aimante, qui aimait me donner à dîner à moi seul, et m'entretenir de petites choses et de Dieu, de ces moments enchantés de ma jeunesse où j'avais l'impression d'être à la table d'une fée-marraine pouvant intercéder pour moi dans les royaumes fermés. Et puis l'autre image se superposa dessus peu à peu, et j'avais là, comme en moi, une icône des Deux Espagnes. Mais les Lumières, n'est-ce pas, les Lumières... Vieille, atteinte d'Alzheimer, malade, elle avait oublié Dieu, l'Eglise, c'était dans ses yeux rieurs la jeune fille un peu folle qui jurait joyeusement. Quelque chose de la fête inaugurale n'avait pas voulu mourir en elle et germait à nouveau.

A Tomasa Benito, demoiselle de la République espagnole, fille des Lumières, un salut d'espoir.

29 janvier 2008

Sepia

L'impératif d'amusement, l'homo festivus, le bougisme, voilà qui affecte grandement bonne part de la sphère bande dessinée. Moi, je m'amuse quand et comme je veux, pas sur commande, en pressant un bouton. Et il est des joies secrètes, des vues de l'esprit impartageables, tout ce qui animait les jeunes amants Sartre et Beauvoir par exemple : cela fait si longtemps que ça ? Les vierges rouges, militantes de révolutions en marche, godardiennes en diable, ennuyeuses et excitantes remâcheuses de logomachie, semblent à présent tellement sepia que l'on s'étonne à peine de vieillir.

6 janvier 2008

Sondage Livres hebdo

Ce sondage me ferait m'arracher les cheveux s'ils n'étaient ras. Barbery et sa nunucherie, la fin de XIII, le Quid... sont-ce là vraiment les événements importants pour le livre en 2007 ?

La mort de l'immense éditeur que fut Christian Bourgois, à laquelle Livres hebdo consacre par ailleurs un hommage dans sa revue, me semble chose bien plus importante : avec lui, c'est toute une époque, une génération d'éditeurs, qui s'en va.

31 décembre 2007

A mes amis...

... ces quelques lignes, lues cet après-midi, pour terminer l'année avec Maximilien Robespierre : "Est-il un remède à tant de maux ? Pour moi, je crois que dans les grandes crises de cette nature, il n'y a que les grandes vertus qui puissent sauver les nations, et je ne suis pas du nombre de ceux qui jugeant la nation par eux-mêmes ou par leurs pareils, pensent qu'elles sont étrangères à la France." ("Adresse aux français", juillet 1791, Oeuvres de Maximilien Robespierre, T. XI Compléments (1784-1794), Société des Etudes Robespierristes, 2007, p. 375. En guise de voeux...

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28 décembre 2007

"L'île de Ré terre protestante" de Pascal Rambeaud

Voici sorti un livre important qui fera date sur la question (aux éditions La Découvrance), par un vrai historien, spécialiste du protestantisme, mon ami Pascal Rambeaud*, dont la capacité à lire l'archive du XVIe siècle a toujours sidéré le myope que je suis. Je le conseille à tous ces parisiens (et jolies parisiennes) venant s'installer ou profiter de l'île et qui la verraient comme un lieu de folklore, entre ânes en culotte et quichenottes de pacotille. L'histoire, c'est le contraire du folkore.

* Auteur par ailleurs de La Rochelle fidèle et Rebelle (au Croît-Vif) et du monumental De La Rochelle vers l'Aunis. L'histoire des réformés et de leurs églises dans une province française au 16e siècle (éd. Honoré Champion).

27 décembre 2007

Une drôle de fabrique

Grosso modo, la fabrique du poujadisme*. Un peu comme quand je tente de demander l'Humanité dans certains petits points de presse de province...

* Sur le poujadisme précisément, cet autre titre, toujours aux Presses de Sciences Po.

19 décembre 2007

Ce qui vient

Le nouveau Manière de Voir (n°96), consacré à "la fabrique du conformisme" rejoint le Storytelling publié à La Découverte et d'autres publications sur le triomphe d'un certain "nouveau gramscisme de droite" (très éloigné de l'offensive "Nouvelle droite" des années 70-80) : une métapolitique clairement conservatrice et anglo-saxonne. Ce néo-conservatisme qui gagne la vieille Europe des Lumières et semble tout emporter.

D'urgence, lire le n°17 de ContreTemps : Lumières, actualité d'un esprit.

14 décembre 2007

Le mandala prolétarien de PieR Gajewski

Je ne sais ce qu'il pensera de cette dénomination, mais c'est ce que m'évoque ce tournis des "temps modernes", une page de belle composition et fort impressionnante. Cela rend impatient de voir le projet avancer encore...

10 décembre 2007

Thèse en Sorbonne sur "Charlotte Corday et l'attentat contre Marat"

Cet après-midi, en Sorbonne, le jeune historien Guillaume Mazeau soutenait sa thèse sur Charlotte Corday et l’attentat contre Marat : événements, individus et écriture de l’histoire (1793-2007), thèse sous la direction de JC Martin, avec, dans le jury des gens comme JP Jessenne* ou Timothy Tackett**.

Selon les mots de l'impétrant : "Dans ce travail, nous proposons de revenir sur l’assassinat de Marat, commis le 13 juillet 1793 par Charlotte Corday (1768-1793). L’événement souffre en lui-même d’un préjugé historiographique, qui fausse la compréhension d’une période qui précède immédiatement la « Terreur ». Il soulève aussi des questions plus épistémologiques en ce qui concerne l’écriture de l’histoire. A travers l’examen de l’événement et de ses conséquences immédiates, de ses causes biographiques puis de ses effets à très long terme, dont l'importance est à réévaluer, nous avons voulu montrer qu’il peut être utile de déplacer le regard sur Corday. Ce renversement rétablit en effet la dynamique positive de l’événement, non plus identifié par défaut comme la « mort de Marat », mais comme « l’attentat commis sur Marat », qui porte une signification propre que le statut de la victime n’explique plus à lui seul. Ce rôle de l’événement dans la mise en place de la configuration qui permet la « Terreur », définie comme une politique des émotions, semble être confirmé par l’examen de la famille et du milieu de Corday. Il se confirme surtout à la lumière des conséquences et échos de l’acte, dont le régime d'action procède à la fois du tyrannicide, du régicide et du terrorisme moderne et participe à la fondation d'une nouvelle modernité au cours du XIXe siècle. Cette dernière dimension constitue la finalité de notre démarche. De 1793 à 1815 et dans une moindre mesure jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’attentat frappe par sa capacité à agir sur l’actualité politique, sociale et culturelle française et même européenne. Au début du XXe siècle, l’événement est ensuite délaissé par les universitaires, au nom d'une nouvelle échelle de distincton scientifique et politique. Capté par les milieux opposés à la République et à son nouveau roman national, l'événement devient un des multiples épisodes d'une plus large révision du passé. En décloisonnant ce qui est communément appelé l’histoire d’un côté, l’historiographie et la mémoire de l’autre, nous proposons une nouvelle articulation des régimes temporels par lesquels on analyse un événement, et entendons participer à redéfinir les catégories scientifiques désignant habituellement des usages du passé certes différents, mais peut-être pas inconciliables. Ces propositions s'insèrent donc explicitement dans les débats actuels entre politique, histoire et mémoire pour mieux réaffirmer la spécificité et l’utilité de l’expression universitaire de l’histoire."

Ceux qui comme moi sont alléchés par ces lignes, peuvent, en attendant la publication de cette thèse importante et qui fera date, se reporter à un aperçu de ses travaux, paru chez Geste éditions, un Charlotte Corday en trente questions, qui ne peut qu'ouvrir l'appétit. On peut aussi retrouver sa signature dans les AHRF, ici par exemple.

Depuis que jai appris que Valérie Mangin avait soutenu une thèse d'histoire des institutions, non publiée, je pense et repense à ces monceaux de recherches qui dorment... Publiez, publiez, il se trouvera toujours des lecteurs heureux de vous lire !

* Qui dirige par exemple Vers un ordre bourgeois ? Révolution française et changement social, aux PUR, ma lecture du moment. Une passionnante mise au point historiographique sur la question de la "révolution bourgeoise", éloignée des tranchées d'il y a quelques années. Les choses se sont bien calmées et les historiens de maintenant font feu de tout bois, quoi qu'il soit dur de voir se dégager des vues d'ensemble, tant l'histoire se trouve "en miettes". Il est en tout cas bon de voir revalorisé et défendu tout un héritage historiographique, notamment l'oeuvre de Lefebvre, à qui je dois de grands moments de lecture. Ce livre me fait en tout cas enrager de ne pas assez posséder de langues, tant de livres passionnants sur la Révolution n'étant pas traduits en français.

** En français, on peut lire ce livre, celui-là, ou encore celui-ci.

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